De Cyr ADOMAYAKPOR
En ce 1er mai, jour de la fête du travail, en dehors des droits légitimes des travailleurs et de leurs revendications sociales, qu’elles soient d’ordre salarial ou autre, il me paraît opportun d’examiner quelque peu la notion du mérite…
La réussite est un mystère ; l’échec est un mystère. Entre la réussite et l’échec, il y a une redoutable frontière, qui, elle-même, est une énigme ; et cette énigme enveloppe nos vies dans les plus excitants et romanesques défis ou dans les implacables duretés des tribulations de la vie. Là, précisément, se trouve le grand saut dans l’inconnu, et, sur lequel l’esprit bute, s’acharne en se frayant à travers obstacles et vicissitudes les voies capricieuses d’une issue souvent aussi impénétrable que celle qui préside incertainement à la chance, à l’amour, au bonheur, au talent, au mérite. En effet, ce mérite, quelle étoile le régit ? Quelle main le dirige ? Quel inconscient le dicte ?
Nous savons tous qu’il est un des préjugés les plus funestes de nos sociétés, puisqu’il empoisonne – eh oui !- les rapports des individus entre eux et suscite le désespoir dû à un sentiment d’injustice, ou d’ostracisme, l’envie, la haine, parfois – quelle horreur !- le meurtre, que l’on trouverait à coup sûr, si l’on cherchait sérieusement parmi les causes secrètes de certaines situations tragiques, ce mérite, disais-je, est sujet à caution.
Car, récompenser les hommes à proportion de leur mérite est une de ces idées les plus justes qui soient, et ce, dans l’idée de combattre le hasard de la naissance et de la fortune comme seul outil de promotion sociale. Mais en même temps, elle est une de ces idées si complexes à égaliser, et dont l’éclat fallacieux étourdit trop souvent les esprits, lesquels voient là dans le mérite le triomphe de l’égalité, une sorte d’égalité juste. Cependant, là où le bât blesse, c’est que ce mérite, quelque paradoxal que cela puisse paraître, a toujours été ça et là dans le monde, surtout dans les milieux de « pouvoirs » sérieusement malmené !
Ainsi avons-nous -on ne sait trop comment cela s’est fait : par amitié, par intérêt, par des arrangements, par pitié, par hasard ou par l’œuvre salutaire de l’esprit de compensation, ou plus exactement d’équité, qui préside aux destinées du monde,- la stupéfaction de constater la promotion des incapables et autres médiocres, des arrivistes présomptueux dans une insolente prospérité quand les vrais bourreaux de travail, mus par une haute idée de leur mission, s’aigrissent à la tâche. Des faux-culs, des lâches à tous les étages, ployant sous les honneurs suprêmes, donnant ainsi, à tort ou à raison, l’impression d’une certaine relégation de l’excellence et du mérite au second plan, et entrant de même dans une sorte de cénacle, de collège fermé et privilégié, dont les membres, imbus d’un sentiment de supériorité, sont convaincus d’être juchés au sommet de toutes les hiérarchies terrestres ! Le monde à l’envers quoi !!!
Fort heureusement, le temps se révèle comme un puissant vent qui soulève le voile sur les méfaits, les dégastations incalculables ainsi occasionnées. Et, parmi les ombres, luira toujours le vrai génie créateur, qui, lui, n’a point à rougir ; et chez nous, un rempart s’élève.
