Société

Reportage au Nord-Togo : « le silence bruissant » des filles brisées à Kpendjal

Depuis 2021, la région du Kpendjal, au nord du Togo, est marquée par les menaces terroristes qui inquiètent autorités et populations. Pourtant, une autre forme de violence, moins visible mais tout aussi destructrice, continue de ravager les communautés : les mariages précoces, les enlèvements et les violences sociales et sexuelles envers les jeunes filles. Qui pour sauver ces filles de cette forme de violence et d’insécurité ? Le gouvernement est vivement interpellé !

Au-delà du terrorisme, les jeunes filles font face presque quotidiennement une autre forme d’insécurité dans le nord du pays. Le reportage des confrères du journal Laabali, publié le 16 avril 2025, met en lumière cette réalité étouffée par la loi du silence.

Dapampoua, 13 ans, donnée en mariage pour une dette

À Gnindjenga, Dapampoua, âgée de 13 ans, vit dans une concession délabrée où elle joue désormais le rôle de maîtresse de maison. Abandonnée par sa mère, brisée par la misère et les coups, la fillette témoigne : « C’est ma propre mère qui m’a donnée en mariage. » L’histoire commence par une dette : sa mère ne peut régler les 120 000 FCFA exigés pour sa formation en tissage. En échange du paiement, elle la promet à un homme. Mariée de force, Dapampoua quitte l’atelier de Latifa, la tisserande qui l’avait prise sous son aile.

L’affaire éclate lorsque Latifa porte plainte pour récupérer ses frais. C’est là que les autorités découvrent le jeune âge de la fille. Une brève détention du père et du mari suit, mais la mère reste introuvable. La gendarmerie ordonne son retour à l’atelier, mais le poids des traditions et le silence de la communauté réduisent à néant les efforts de justice.

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Un fléau qui ronge plusieurs villages

Loin d’être un cas isolé, la situation de Dapampoua se répète ailleurs dans la préfecture. À Tambonga, le chef de canton Damtal 1er évoque une autre jeune fille, apprentie couturière, également mariée de force. Là encore, l’affaire débute par un conflit financier entre la formatrice et la famille. Malgré la plainte, l’impunité règne : « C’est un dossier brûlant. Cela me préoccupe », confie le chef, en pointant du doigt la complicité de certains leaders communautaires et le manque d’éducation des parents.

À Malgbongou, Larba, 14 ans, disparaît après une journée au champ. Un homme, veuf, l’enlève et informe sa famille qu’elle est désormais sa femme. Après une plainte, la jeune fille est rendue à sa mère… avant d’être à nouveau enlevée par le même ravisseur.

L’école, un luxe inaccessible pour les jeunes filles

Dans cette région, la scolarisation des filles est un combat difficile. « L’école est perçue comme un long chemin incertain », explique Alidou Zakali, enseignant. Les familles, souvent confrontées à une extrême pauvreté, voient dans le mariage un moyen de réduire leur charge financière ou de régler des dettes. Les filles, quant à elles, grandissent avec la certitude que leur avenir se décide sans elles.

La loi togolaise interdit pourtant le mariage avant 18 ans depuis 2007. Mais cette protection légale reste souvent théorique. Selon Abel Adjafi, directeur de l’Action sociale, les moyens manquent cruellement : « Nos ressources sont limitées. »

Des résistances s’organisent dans l’ombre

Face à cette réalité douloureuse, des voix s’élèvent. Des femmes comme Latifa, des chefs courageux comme Damtal 1er, des enseignants, des journalistes, dénoncent, alertent, agissent. Des campagnes de sensibilisation naissent, des plaintes sont déposées, même si elles restent souvent sans suite. Ces acteurs locaux réclament un engagement plus ferme de l’État et un appui renforcé des ONG pour briser le cercle de la violence.

Le combat pour les droits des filles dans le Kpendjal ne fait que commencer. Mais tant que la misère, l’ignorance et la peur domineront, ce sont des vies entières qui continueront de s’éteindre en silence.

Avec Ici Lomé

TOGONYIGBA

Lomé-Amadanhomé (Togo) | RCCM:TG-LOM 2018 A 5677 | N° Récépissé:0425/24/03/11/HAAC | Banque:Orabank / Numéro de Compte:06101-65386500501-49 (agence kpalimé) | Courriel:togonyigba@gmail.com | Boîte postale:23BP90053539 Lomé Apédokoè | Tel:(00228) 99460630/93921010 | Directeur Général:José-Éric Kodjo GAGLI (LeDivin)

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