Santé

[LeCoupD’œil] Les bouillons utilisés dans la cuisine africaine : une assiette de maladies chroniques silencieuses

Dolli, Magi nokoss, Jumbo, Maggi poulet, Onga, Bon food, Djamila, Joker, Adja, Jongué, Tak, Mami, Khadija, Dior, Tem Tem, autant de bouillons utilisés dans la cuisine et particulièrement en Afrique pour apporter la différence dans sa marmite. C’est une assiette de maladies chroniques silencieuses qu’elle sert (…) Autrefois les plats africains préparés par nos mamans avec des ingrédients naturels, serait-il devenu un vrai poison pour le citoyen lambda avec les bouillons qui pullulent dans nos marchés ? La réponse coule de source, face à la recrudescence des maladies non transmissibles.

L’espérance de vie dans nos pays en a pris aussi un sacré coup.

De nos jours, le repas traditionnel, bien assaisonné, présenterait des goûts culinaires souvent plus exquis que ceux de nos mammys. Les femmes de l’Afrique de l’ouest féruees de bonne saveur ont l’art de mettre du piquant dans l’assiette. Toutes sortes d’ingrédients passent dans la marmite qui s’appauvrit de plus en plus en valeurs nutritives et s’enrichit en sel et calories. Quand les exhausteurs du goût s’y mettent, il faut simplement s’attendre à un cocktail….explosif.

Nombreux sont ceux qui pointent l’index sur la cuisinière : le poison est dans l’assiette.

Lanmoumou déssi

Aux togolaises aujourd’hui, il est reproché de mettre trop d’additifs culinaires dans la marmite pour aiguiser l’appétit, dénaturant les plats. En prenant l’exemple de la sauce aux poissons frais « lanmoumou déssi », très prisée au Sud du pays qui aurait été, à l’origine, un plat riche en protéines, on y retrouve dans sa préparation, de la tomate en poudre en sachet ou en boîte et plus d’une dizaine de bouillons mis à l’actif. Notons par ailleurs que « lanmoumou déssi » est une soupe de tomate qui accompagne le riz, le foufou d’igname, la pâte de maïs « akumè », etc.. cette soupe peut également être associée à la sauce fétri déssi, à essayer avec un bon akumè

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Le constat est amer. « La recrudescence des maladies telles le diabète et l’hypertension artérielle sont causées par nos femmes, surtout les tenancières de maquis qui nous tuent à petit feu, avec leurs substances toxiques. Nous sommes tous malades à cause d’elles. Elles ne cherchent qu’à écourter la vie des hommes… » , souligne, un brin ironique, un vieux qui tient sur ses 70 berges, rencontré dans un village de kloto. Il demande aux autorités de ramener à la raison les togolaises, face à leur utilisation abusive de cette armada de bouillons présente sur les marchés. Il n’est pas le seul. Le 3éme âge se remémore, avec nostalgie, les recettes toute nature et sans artifice d’antan. « A notre époque, on resplendissait de santé. On était en pleine forme, car on mangeait sainement. L’alimentation était meilleure ». Du tout bio !

Le bouillon règle un problème économique. Ils donnent l’illusion du goût

Autre temps, autres réalités. La crise économique a donné un coup de fouet au panier de la ménagère. Aujourd’hui, déplore Mme Céline, une universitaire, par ailleurs membre active de l’association togolaise « Amis Sincères » qui par moment anime des rencontres-débat « Compagnie du bien manger », qui réunit nutritionnistes, diététiciens et spécialistes de la santé, les pays africains sont des otages d’une épidémie d’hypertension. « Même les jeunes sont hypertendus », note t-elle. Et ce à cause, d’une alimentation trop riche en sels. Mme Céline craint que cette situation ne s’aggrave, en raison de la baisse du pouvoir d’achat des togolaises. « C’est un problème de société qui se pose. La structure du budget n’est plus la même. Les repas sont fractionnés, les charges énormes et le coût de la vie très élevé ». Quand elle passe à la loupe les habitudes alimentaires des togolaises, c’est pour détecter que le mal est d’une dimension économique. Mme Céline de s’expliquer. « Jadis, dit-elle, nos mamans mettaient assez de viande, de tomates fraîches, de légumes frais et d’ingrédients dans la marmite. Ce n’est pas par effet de mode que, de nos jours, les femmes recourent de plus en plus aux additifs culinaires. Les bouillons règlent une dimension économique. Ils donnent l’illusion du goût. Du point de vue gustatif, cela donne de l’appétit ».

« Rééduquer la femme africaine et lui apprendre à manger sainement »

Pour renchérir ses dires, Mme Céline de donner l’exemple de l’équation intenable de la ménagère togolaise qui dispose d’un maigre budget. « Ce n’est pas facile avec une maigre somme de préparer du riz pour plus de quinze personnes avec un kg de viande ou peu de poisson. Tout est cher au marché. Des sardines qui se vendaient à 50f par pièce s’échangent aujourd’hui à 500 f, le kg de kéthiah coûte 1200 F Cfa, un kg de tomates fraîches est vendu à 600. Elles n’ont pas souvent le choix », explique t-elle. Pour résoudre une difficile équation, la ménagère n’y va par quatre chemins. Elle se rabat sur les multiples bouillons qui donnent le goût du poisson, de la tomate, des épices, de la viande ou des légumes. Il suffit juste de débourser au maximum 200f pour s’offrir autant de saveurs. Et le tour est joué même si les conséquences sont désastreuses, avec des maladies chroniques et silencieuses. Il s’y ajoute, d’après Mme Céline, qu « il y a trop de sel dans notre alimentation. On aime ce qui est saturé en gras et en sel ». Selon elle, crever l’abcès exige de s’attaquer aux produits synthétiques qui inondent le marché togolais. Les bouillons ne sont pas, à cet effet, des cas isolés. « On ne boit plus, par exemple, du jus mais que des arômes qui sont des produits chimiques ». Avec le système des journées continues, les sandwichs, très prisés à midi, se font à forte teneur de mayonnaise, de moutarde, de ketchup qui sont tout aussi nuisibles à la santé.

Comme solution, Mme Céline préconise le retour du repas commun en famille. « On n’a pas d’alimentation idéale à proposer, cela n’existe pas. On doit partir de ce que les gens ont pour changer leurs habitudes alimentaires, en tenant compte des données économiques. Il faut rééduquer le togolais et lui apprendre à manger sainement » comme à l’époque de nos grands mamans.

Ledivin

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