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9e congrès panafricain au Togo • « Le panafricanisme ne doit pas rester au stade des discours » : José-Éric K. GAGLI

Du 8 au 12 décembre 2025, Lomé est le lieu d’accueil du 9ème congrès panafricain, un événement qui provoque de nombreuses réactions à travers le continent. Alors que certains célèbrent la Décennie des Racines Africaines, d’autres émettent des critiques. José-Éric K. GAGLI, juriste, consultant en stratégie de communication et directeur du groupe de presse TOGONYIGBA, partage son point de vue franc dans une interview avec nos confrères de Pyramide TV. Selon lui, le véritable enjeu consiste à convertir les promesses en actions concrètes et à surmonter les divisions afin de promouvoir la cause africaine.

José-Éric Kodjo GAGLi

Découvrez l’interview ci-dessous.

Journaliste : Depuis le 8 décembre dernier se tient à Lomé, le 9e congé panafricain.Dites-nous, quel est la problématique derrière ?

JoséÉric K. GAGLI : Le thème central porte sur le “Renouveau du panafricanisme et le rôle de l’Afrique dans la réforme des institutions multilatérales : une invite à la mobilisation des ressources et la réinvention pour agir ».

Cet évènement entre dans la célébration de la Décennie des Racines Africaines et de la Diaspora Africaine (2021-2031) telle que décrétée par la 34ème Session Ordinaire du Sommet de l’UA tenue les 6 et 7 février 2021. L’adoption de la Décennie des Racines Africaines et de la Diaspora Africaine a été une réponse à une communication et demande initiale formulée par la République du Togo le 10 février 2020 lors de la 33ème Session Ordinaire de la Conférence des Chefs d’Étatet de Gouvernement de l’Union Africaine.

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En fait le panafricanisme ne date pas d’aujourd’hui. Il a été propulsé au 19ème siècle par des leaders afro-américains comme W.E.B Du Bois, Marcus Garvey, Malcom X, Georges Padmore mais aussi des leaders africains comme Kwame Nkrumah, ou le martiniquais Frantz Fanon.

Ce panafricanisme de combat avait toute sa pertinence dans les mouvements de décolonisation dans la décennie 50-60 qui a vu l’émergence des leaders charismatiques comme Nasser, Jomo Kenyatta ; Sylvanus Olympio, Felix Moumié, Amical Cabral, Julius Nyerere, Ahmed Sekou Touré. Il y a eu aussi des scientifiques comme Cheikh Anta Diop qui marqua la dimension scientifique du panafricanisme à travers ses travaux de recherche sur l’égyptologie et ses ouvrages.

Parmi les leaders, on note la présence des femmes valeureuses comme la martiniquaise Paulette Nardal et Anna Julia Cooper, dont le centenaire de sa thèse de doctorat obtenu en 1925 à Sorbonne est célébré cette année 2025.

On peut également parler du panafricanisme économique avec le Nigérian Dangote ou le togolais Gervais Koffi Djondo co-fondateur de l’Ecobank et de la compagnie aérienne Asky.

Aujourd’hui, le combat n’est pas tant l’émancipation du noir mais la réappropriation de l’identité culturelle du noir et la renaissance africaine dans un contexte de reconfiguration géopolitique du monde avec l’affaiblissement des puissances coloniales occidentales.

Depuis des années, l’Afrique a enregistré beaucoup de discours sur le panafricanisme et beaucoup d’actions ont été également énumérées. Qu’est-ce qui explique l’inexécution de ces actions ?

Je dis souvent que Bien fait et mieux que bien dit… Vous conviendrez avec moi qu’un discours sans action est sans effet. Sans action, rien ne peut changer malgré la noblesse et la pertinence des discours. L’inaction peut s’expliquer par l’absence de structuration ou d’organisation avec des moyens conséquents pour la mise en œuvre. Des institutions comme l’Union Africaine qui pouvait jouer un rôle de leadership sont plus préoccupés à résoudre les questions politiques qu’à se pencher sur les questions structurelles comme le panafricanisme. L’agenda 2063 de l’UA, l’Afrique que nous voulons n’a pas un budget conséquent mobilisable pour mettre en œuvre les actions. La principale raison est donc l’absence d’une volonté réelle pour défier le statut quo. Les discours sans actions réelles ne changeront rien.

Pourquoi, selon vous, le choix de Lomé pour abriter ce congrès a suscité des controverses?

Pour moi, la controverse se situe à plusieurs niveaux.

Les critiques de l’organisation d’un tel évènement majeure à Lomé estiment que les dirigeants togolais ne sont pas des modèles de défense de la cause noire à l’image des pères fondateurs du panafricanisme. Les questions des prisonniers politiques, d’atteinte aux droits de l’homme, l’absence de liberté de parole, de la corruption des élites sont avancées.

Il y a aussi le lobbying de la diaspora togolaise parmi laquelle les opposants au régime du PC, M. Faure Essozimna Gnassingbé qui pense que le régime togolais est réfractaire à l’alternance démocratique.

Pour ma part, on ne doit pas jeter l’enfant avec l’eau du bain. Il faut saluer le courage politique des dirigeants du Togo qui ont pris le leadership sur ce chantier oublié même si on observe une prolifération des panafricanistes de plateaux de télé et des réseaux sociaux qui sont aussi écoutés surtout par la jeunesse. Ce sont des personnalités comme Kemi-Seba, Nathalie Yamb qui ont appelé ouvertement au boycott du congrès de Lomé. Une autre personnalité très suivie sur les réseaux sociaux est le Pr Franklin Nyamessi qui est venu à Lomé malgré les critiques acerbes qu’il a déversé sur le régime de Lomé ces dernières années.

Si la cause est commune ont doit voir l’essentiel et mutualiser les énergies sans oublier les principes fondamentaux du respect de la dignité humaine. Certains participants notamment les afro descendants, n’ont pas manqué de courage pour dénoncer ou s’indigner de la situation des droits de l’Homme au Togo. Je pense que ce courage de dénonciation publique interpelle les autorités togolaises et je sais que ces autorités tiennent beaucoup à leurs images et donc chercheront à faire des efforts dans les domaines évoqués comme a situation des prisonniers politiques.

Ce congrès a-t-il réellement parlé aux jeunes africains ou il est encore bloqué à l’étape des discours ?

Globalement, il est trop tôt d’apprécier l’impact du 9e congrès panafricain sur les jeunes. Je pense que la jeunesse africaine est hyper branchée. L’effet de ce congrès sur la jeunesse togolaise par exemple est limitée à mon avis car le congrès a été organisé sous une haute surveillance sécuritaire. C’est normal car certains jeunes togolais de la diaspora avaient appelé à des manifestations dans les rues le 1er jour, c’est à dire le 08 décembre 2025. Il faut aussi dire que la situation préoccupante qui est intervenue entre temps au Bénin voisin à également tourné l’attention de la jeunesse vers l’actualité de la tentative de coup d’État avorté au Bénin.On

On verra si à la sortie de ce congrès une feuille de route claire sera établie sinon ce sera un congrès de plus en attendant l’organisation du 10ème congrès. Bref, et on restera malheureusement dans les beaux discours !

Quelles sont les attentes des africains au sortir de ce congrès ?

Personnellement, je suis très peu optimiste sur une suite favorable en se rappelant du grand évènement organisé par le Togo en 2016. En effet, rappelez vous que le Togo a organisé en octobre 2016, le Sommet extraordinaire de l’Union africaine sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique.  Ce sommet a vu l’adoption de la charte de Lomé portant sur la lutte contre la piraterie, le terrorisme, la pêche illicite et la criminalité maritime. Près de 10 ans après, personne ne parle de cette charte. J’ai peur que le 9ème congrès panafricain connaisse le même sort.

Cependant, dans un élan plus optimiste, je pense que le Togo voudra donner un tournant décisif au panafricanisme avec des propositions concrètes aux chefs d’États africains car après tout, ce sont les décisions politiques qui donnent les orientations à faire.

L’organisation du congrès est une réussite pour le Togo du moins sur le plan de la diplomatie. Mont souhait en tant que togolais est de voir le leadership du PC, M. Faure Gnassingbé se poursuivre d’ici les 3 ans à venir afin de mettre afin de mettre en œuvre les principales recommandations qui seront formulées au cours de ce 9ème congrès.

Merci M. José-Éric GAGLi

Merci à vous également

TOGONYIGBA

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