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Polémique sur l’Académie française/ Véronique Perry: la langue française est « classiste, sexiste et raciste » Elle donne des explications

« La langue appartient au peuple et régenter la langue par le biais d’une académie est en soi une forme d’autoritarisme et d’appropriation », dénonce Véronique Perry, pour qui l’institution est une « aberration ».

Créée en 1647, sous la houlette du cardinal de Richelieu, l’Académie française a toujours eu pour objectif de surveiller la langue française ou une certaine idée de la langue française. « L’objectif était de donner une règle, mais aussi d’imposer, car la langue a un pouvoir politique, économique et même culturel », précise Mary C. Lavissière. L’Académie est donc protectrice d’une langue « pure », selon ses propres définitions, qui s’avère « classiste, sexiste et raciste », d’après Véronique Perry.

Ainsi, « le grammairien Claude Faivre de Vaugelas fixe [en 1647] les règles de l’accord établissant que « la forme masculine a prépondérance sur le féminin, parce que plus noble » », ce que l’autre grammairien Nicolas Beauzée confirmera en 1767 en ajoutant « à cause de la supériorité du mâle sur la femelle », explique la linguiste dans ses travaux. Dans l’Hexagone, les classes supérieures mettent un point d’honneur à sacraliser la langue de Molière. Alors que Voltaire s’amusait à faire des fautes d’orthographe pour agacer l’institution, « la société [continue de] juge[r] la qualité de l’autorité d’une personne par rapport à son accent ou son langage », souligne Mary C. Lavissière.

« Un rapport affectif à la langue »
En près de 90 ans, les immortels n’ont pas produit un seul dictionnaire complet, la neuvième édition n’étant pas encore achevée. Les immortels s’expriment surtout sur l’usage d’un mot ou d’une expression nouvelle qu’elle refuse d’approuver. Pour Véronique Perry, experte du langage, l’Académie française « ne devrait pas exister ». « Ce sont tous des écrivains qui ont un rapport affectif à la langue et non pas scientifique. Dès qu’il s’agit de réforme, que le peuple ou que d’autres personnes qu’eux-mêmes veulent donner un avis sur la langue qu’ils ont sacralisée, ils s’insurgent », regrette la chercheuse.

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« Les institutions sont en général conservatrices, notamment l’Académie. Mais le risque c’est de devenir entièrement détaché de l’usage de la langue française et de la personne lambda » et donc, à terme, de finir « écarté de la conversation sur la langue » et ses évolutions, explique Mary C. Lavissière. A force de tenter de figer la langue française, l’Académie risque en effet d’apparaître comme un symbole du passé et de se déconnecter du reste de la population française qui, elle, ne cesse de s’amuser et se taquiner au sujet de sa diversité linguistique. Tancarville ou étendage, pain au chocolat ou chocolatine, mouillettes ou bûchettes à tremper dans son œuf à la coque… Quel que soit le nouvel immortel, l’usage continuera à triompher.

Olivier KOUDJO

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