Santé

Santé : un vaccin contre le paludisme ?

Des chercheurs de l’université d’Oxford et du Burkina Faso ont mis au point un vaccin contre le paludisme efficace à 77 %.

Baptisé R21/Matrix-M, le vaccin a été testé sur 450 enfants âgés de 5 à 17 mois à Nanoro, Burkina Faso, un milieu de transmission du paludisme hautement saisonnier. Les résultats de cet essai clinique ont été publiés le 20 avril 2021 dans la revue médicale The Lancet.
Le vaccin s’est révélé efficace à 77 % dans le groupe ayant reçu la dose la plus élevée, et à 71 % dans le groupe ayant reçu la dose la plus faible. C’est le premier vaccin dont l’efficacité s’élève à plus de 75 %, non loin de l’objectif 80 % fixé par l’OMS d’ici 2025

« Ce sont des résultats très excitants qui démontrent des niveaux d’efficacité sans précédent pour un vaccin bien toléré dans le cadre de notre essai. Nous attendons avec impatience la phase III pour présenter des données de sûreté et d’efficacité à grande échelle de ce vaccin plus que nécessaire dans cette région », a déclaré Halidou Tinto, professeur de parasitologie, directeur de l’IRSS à Nanoro (Burkina-Faso), rapporté par Futura Santé.

Le paludisme ou la malaria est une maladie infectieuse due à un parasite du genre Plasmodium, propagée par la piqûre de certaines espèces de moustiques anophèles.
Avec environ 230 millions de personnes malades, le paludisme demeure la première cause de mortalité et de morbidité en Afrique. Elle touche majoritairement les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes.
RTS, S/AS01, le candidat vaccin antipaludique le plus efficace à ce jour, a démontré une efficacité de 55,8% (intervalle de confiance [IC] de 97,5%, 51-60) sur 12 mois chez les enfants africains.

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Un vaccin contre le paludisme ? Longtemps, ce Graal a semblé inaccessible. Ce n’était pas faute de chercher : au total, plus de 100 candidats vaccins ont été testés chez l’homme contre Plasmodium falciparum, le parasite responsable de la maladie. En vain, jusqu’ici. L’enjeu est de taille : en 2019, la maladie a touché 229 millions de personnes dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), et causé 409 000 décès, dont 94 % en Afrique et 67 % concernant des enfants de moins de 5 ans. A eux seuls, six pays d’Afrique assument plus de la moitié de cette mortalité : le Nigeria, la République démocratique du Congo (RDC), la Tanzanie, le Mozambique, le Niger et le Burkina Faso.

Après un an de suivi, aucun effet indésirable grave n’a été observé. Et les premières évaluations sont prometteuses, avec une efficacité calculée de 71 % pour le premier groupe et de 77 % pour le second. « Pour la première fois, un vaccin contre le paludisme atteint l’objectif de 75 % d’efficacité dans une population d’enfants africains après un suivi de douze mois », se réjouissent les auteurs de ce travail coordonné par le professeur Adrian Hill, de l’université d’Oxford, et le professeur Halidou Tinto, directeur régional de l’Institut de recherche en sciences de la santé (IRSS), qui a conduit l’essai clinique.

Système immunitaire affaibli
La mise au point d’un vaccin antipaludique est ardue à plus d’un titre. « Aucun vaccin n’a jamais été approuvé contre une maladie parasitaire humaine, rappelle Adrian Hill. D’abord, il faut choisir, parmi les milliers de gènes du parasite [au lieu d’une dizaine de gènes seulement pour les virus], celui qui déclenchera la meilleure réponse vaccinale. Ensuite, il faut déclencher la production de taux très élevés d’anticorps – ce qui, au plan technique, est compliqué. »

Autre difficulté : le parasite du paludisme a un cycle de vie complexe qui comprend quatre stades, chacun nécessitant un vaccin différent. Et l’infection par ce parasite, ultime perfidie, affaiblit le système immunitaire. « Cela complexifie d’autant la mise au point d’un vaccin dans les régions qui en ont le plus besoin », déplore Adrian Hill.

Pourtant, la perspective d’y arriver enfin se précise depuis quelques années déjà. Ainsi, la firme GSK développe un vaccin antipaludique depuis près de trente ans, en collaboration avec une organisation à but non lucratif, la Malaria Vaccine Initiative (MVI). Nommé RTS,S/AS01, il a été évalué chez 15 000 enfants en bas âge dans sept pays d’Afrique subsaharienne lors d’un essai de phase III. En 2015, le verdict est tombé : chez les enfants vaccinés entre 5 à 17 mois, près de quatre cas sur dix de paludisme et trois cas sur dix de paludisme grave ont été évités au bout de quatre ans.

À la demande de l’OMS, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a expertisé ce vaccin et donné en 2015 un avis favorable. L’OMS a toutefois demandé une évaluation de ses bénéfices en conditions de vie réelles. Cette analyse est actuellement menée dans trois pays (Ghana, Kenya et Malawi) et devrait se terminer en 2023.

Un essai de phase III prévu dans quatre pays
Pour ce qui est du nouveau candidat vaccin, le R21/MM de l’université d’Oxford, les résultats de l’essai de phase II sont « une nouvelle très positive », estime Pedro Alonso, directeur du Programme mondial de lutte antipaludique de l’OMS : « Mais cet essai a été mené chez 450 enfants. Nous sommes encore loin de disposer des informations qui nous permettraient d’être parfaitement enthousiastes. »

En clair, l’étape suivante est très attendue, celle d’un essai dit de phase III : « Il s’agit d’évaluer l’efficacité et la sûreté de ce candidat vaccin sur un plus grand nombre d’enfants », indique Kristen Kelleher, de l’OMS. Cet essai est déjà prévu chez 4 800 enfants âgés de 5 à 36 mois dans quatre pays : Burkina Faso, Mali, Kenya et Tanzanie. Dans certains, le paludisme est saisonnier ; dans d’autres, le parasite sévit toute l’année. « Ainsi, nous en saurons plus sur l’efficacité de ce vaccin selon les régions », précise le professeur Halidou Tinto.

Si ses promesses se confirment, il sera produit par un laboratoire indien privé, le Serum Institute of India, plus gros fournisseur de vaccins en Afrique. « Comme pour les autres vaccins infantiles en Afrique, il sera rendu accessible grâce aux achats en masse effectués par l’Unicef et l’organisation internationale GAVI », précise Adrian Hill.

Cerise sur le gâteau, la recherche d’un vaccin contre le paludisme à l’université d’Oxford a aussi stimulé la quête d’un vaccin contre le Covid-19, développé avec le groupe AstraZeneca. De fait, celui-ci utilise comme vecteur un adénovirus de chimpanzé. « Or cette technologie a pour la première fois été testée chez l’homme contre le paludisme, en 2007 », explique Adrian Hill. Autre levier favorable : le vaccin R21/MM est développé par Oxford en partenariat avec le Serum Institute of India. Cette alliance, déjà en place en 2020, a grandement accéléré le développement du programme vaccinal contre le Covid-19 auquel a participé AstraZeneca.

Des moustiques génétiquement modifiés
Concernant le paludisme, une chose est sûre. « A eux seuls, ces deux nouveaux vaccins ne permettront pas de l’éradiquer », relève Marc Thellier, responsable du Centre national de référence du paludisme à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris. Les autres outils de prévention gardent toute leur place. Au premier rang desquels les bonnes vieilles moustiquaires imprégnées, auxquelles s’ajoutent désormais les pièges à moustiques autour des villages et la lutte biologique avec des moustiques génétiquement modifiés.

« Si l’essai de phase III confirme le succès de ce vaccin, nous espérons que son déploiement, en combinaison avec les interventions existantes, pourra permettre la survie de millions d’enfants au cours de leurs premières années de vie, la période la plus à risque », relève Halidou Tinto.

Une technologie vaccinale innovante
Le nouveau vaccin (R21/MM) fait appel à la même technologie que celui de GSK. Par un savant jeu de Lego génétique, on fabrique une protéine hybride : elle associe une protéine présente à la surface du parasite à une protéine présente à la surface du virus de l’hépatite B. Premier avantage : ces deux vaccins vont protéger non seulement contre le paludisme, mais aussi contre l’hépatite B.

Cette protéine est la clé qui permet à Plasmodium falciparum d’ouvrir la serrure pour entrer dans les cellules du foie humain où, en temps normal, le parasite va se multiplier. Mais les personnes vaccinées vont produire des anticorps contre cette clé, ce qui bloquera l’infection des cellules du foie. Autre astuce : on s’arrange pour que cette protéine hybride soit portée à la surface de particules qui miment l’enveloppe d’un virus. « Cela va améliorer la réponse immunitaire », explique le docteur Marc Thellier. Dernier atout, et non des moindres : « Notre vaccin est très facile à produire à faible coût », souligne Adrian Hill.

Mais il faut noter une différence. Un an après l’injection de la première dose, le vaccin d’Oxford semble plus efficace que celui de GSK. Pourquoi ? « Dans le vaccin d’Oxford, chaque particule de pseudo-virus incorpore davantage de protéines du parasite. En outre, les deux vaccins font appel à deux adjuvants différents », explique Chetan Chitnis, responsable de l’unité de recherche de vaccins contre le paludisme de l’Institut Pasteur, à Paris. « Nous avons utilisé un adjuvant exceptionnellement puissant à base de saponines, le Matrix M », ajoute Adrian Hill.

Source : LeMonde

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