À dire vrai, et cela, à bien des signes tangibles (…), nous étions un certain nombre, depuis un certain temps, à être quelque peu inquiets du devenir des liens récemment encore très forts entre les deux pays : le Togo et la France, que tant de sangs et de cœurs mêlés assignent à un bel unisson et à un attachement mutuellement indéfectible.
Grande ! Se mesure donc, notre satisfaction ouvertement militante, qui, je l’avoue, ne connaît de cesse de s’allégrer, d’apprendre que le président de la République, Monsieur Faure Gnassingbé, en visite officielle en France sur invitation de son homologue français, Monsieur Emmanuel Macron, a eu un dîner de travail avec ce dernier ; lequel, il faut bien le reconnaître, n’avait pas toujours été tout à fait soucieux et mainteneur de la proximité et de l’intensité qui avaient constamment émaillé les relations franco-togolaises, puisqu’à plusieurs reprises déjà, sans doute par une imparfaite appréciation, il venait jusqu’aux bords de notre pays, sans désirément sauter le pas pour le visiter et le saluer.
Refermons vite cette regrettable parenthèse pour en revenir à l’objet principal de cet éditorial, à savoir cette visite…
Je sais d’expérience que la France, quand elle reçoit, ne reçoit jamais par hasard, et, si même le hasard a parfois de l’esprit à travers d’étonnantes coïncidences, il n’existe généralement pas de hasard en diplomatie où tout est calcul, intérêt et pragmatisme.
C’est ainsi que s’agissant de la France, bien qu’il y demeure encore une certaine forme de générosité tonale en ses principes, sa psychologie diplomatique a des mœurs qui la conduisent, -d’ailleurs comme toutes les puissances et, du reste, tous les pays normalement constitués-, non seulement droit à ses intérêts, mais aussi PRAGMATIQUEMENT droit vers les sphères où s’agitent des ÉVIDENCES.
Des évidences limpides et lourdes de sens…
Aujourd’hui, notre pays le Togo, sous la férule d’une diplomatie inspirée par le président Faure, axée sur la nécessité d’une véritable intégration régionale par le développement économique et social et sur le dialogue partout où des liens peuvent être tissés, renoués, et sur la paix partout où elle peut être sauvée et rétablie, a acquis une dimension clairement indéniable sur le continent. Dimension dont les répercussions font désormais multiplement écho dans toutes les chancelleries du monde !
Et donc, la France qui – pays inventeur de la diplomatie moderne à travers la notion de la raison d’État par les soins du cardinal de Richelieu – regarde, observe, constate et projette, ne peut que reconnaître, saluer, applaudir et encourager un tel élan créateur de dialogues et de paix entre les peuples, au moment même où le monde se fait peur par la résurgence de la guerre froide d’une part, et d’autre part la crainte d’une confrontation directe ou indirecte (Taïwan interposé) entre les USA et la Chine, sans compter l’Afrique qui, elle-même en son sein, est confrontée à un extrémisme violent de plus en plus meurtrier ; et que dire du soulèvement sur le continent d’un puissant sentiment anti-occidental, certes compréhensible à bien des égards, mais largement instrumentalisé par l’émergence de puissantes avidités…
La claire réponse, c’est bien parce que le Togo est devenu incontournable par sa visibilité diplomatique et sa permanence politique stable soutenues par un ambitieux programme de développement économique et social prometteur, que la France, intelligemment, intuitivement et raisonnablement, n’a pas d’autre choix que de se rendre à l’évidence.
Car, il s’agit pour la France, un des premiers partenaires économiques indéfectibles de notre pays d’une ÉVIDENCE à plus d’un titre évocateur et donc affirmateur d’une option. Une option maîtresse : L’ÉVIDENCE FAURE, compatible par sa capacité à coaliser les convergences avec l’ÉVIDENCE FRANÇAISE d’une nouvelle vision de l’Afrique qui se veut résolument plus respectueuse de son histoire, de ses blessures, une Afrique nouvelle telle qu’elle est viscéralement ressentie par ses fils et ses filles, et autant que possible maîtresse de son destin. Car, c’est désormais la seule voie d’assagissement des frustrations explosives, afin que s’en fussent renoués les liens rompus avec une jeunesse parfois désabusée, mais Ô combien ÉSPÉRANTE d’un meilleur avenir dans un monde plus juste.
Qu’il nous soit permis, à tous ceux qui, parmi le Togo, parmi la France et parmi le monde redoutaient une grave dégradation de cette viscérale fraternité, de ne point bouder notre plaisir…
Osons reconnaître ce qui est bon ! Cette visite était une bonne chose !
Ce long dîner qui en dit long, et qui, fort probablement laissera des traces, parce qu’il s’est clairement avéré qu’il ne s’agissait pas seulement d’une rencontre de deux pays amis, mais d’une rencontre entre deux hommes qui se sont découverts dans l’expression assumée de la flagrante sincérité qui les prépondère ; deux hommes dont les aimants humanistes s’attirent inexorablement et qui ont compris qu’il fallait une bonne fois pour toutes anéantir les distances, casser les hypocrisies, briser les frontières des malentendus pour les insérer dans une nouvelle vision commune plus équitable et plus respectueuse des exigences du siècle afin de bâtir ensemble un avenir plein d’humanisme, porteur de solidarités et de progrès dans un monde multilatéral ; une quête permanente chère aux deux hommes d’État.
je lève mon verre aux destins des deux pays dans l’assumation retrouvée et consolidée de leur amitié, et qu’il me soit permis d’avoir ici même une pensée émue, pleine de gratitude et de tendresse pour feu Jacques CHIRAC, le président français le plus togophile qu’il m’ait été donné de connaître.
À mes insatiables pourfendeurs, je leur dis, comme Flaubert disait à propos de Zola : » Il faut pouvoir admirer ce que l’on n’aime pas «
Le GCE Cyr ADOMAYAKPOR