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Festival de Cannes 2023 | Le malien Souleymane Cissé reçoit le Carrosse d’or de la Quinzaine des cinéastes

Le réalisateur malien a été honoré, mercredi 17 mai à l'ouverture du Festival de Cannes en France

À l’ouverture du Festival de Cannes en France, le cinéaste malien Souleymane Cissé à reçu mercredi 17 mai 2023, une distinction prestigieuse pour saluer la carrière inédite de l’homme, le Carrosse d’or de la Quinzaine des cinéastes. Ce prix, qui emprunte son nom à l’œuvre célèbre de Jean Renoir est décerné par la société des réalisatrices et réalisateurs de films.

La Carosse d’Or

C’est  à sa mère que Souleymane Cissé a dédié le Carosse d’Or qu’il venait juste de remporter, sous l’ovation de la salle et en présence de sa famille venue en bon nombre pour assister à l’événement.

Souleymane Cissé

« Le cinéma aura été ma vie, pour cela, je remercie le cinéma de mon enfance, les films vus dans les salles aujourd’hui disparues de Bamako, je me souviens avec émotion de John Wayne, de Kirk Douglas, je me souviens des péplums italiens, que je regardais jeune adulte lorsque je travaillais comme projectionniste dans une maison de jeunes du Mouvement national des pionniers. Tous ces films auront fait vibrer mon âme et mon existence. » a-t-il déclaré.

« Pour finir, je salue les cinéphiles du monde qui ont eu conscience du progrès de l’humanité en ne tenant pas compte de l’origine géographique d’un créateur, ce soir et en cette occasion, sur la carte du monde, il n’y a à mes yeux qu’un pays, celui du cinéma. » a-t-il poursuivi dans son discours.

Notons que le Festival de Cannes est une rencontre du cinéma international qui se tient chaque année à Cannes en France.

Cette année M. Cissé, l’un des pères du 7e art en Afrique a reçu l’une des plus prestigieuses récompenses du festival, le Carrosse d’or, lors de l’ouverture de la Quinzaine des cinéastes. Il est le deuxième africain a recevoir ce prix après le Sénégalais Sembène Ousmane, en 2005.

Pionnier dans son domaine au Mali, le cinéaste Souleymane Cissé, né le 21 avril 1940, est devenu l’une des figures patriarcales du cinéma produit en Afrique de l’ouest. Reconnu par les siens et à l’international, il compte parmi les réalisateurs africains qui tentent d’écrire, parfois dans la douleur, l’histoire semée d’embûches d’une industrie cinématographique qui peine encore à exister chez elle et au-delà de ses frontières.

Mais pourquoi « Le Carrosse d’or » est-il attribué à Souleymane Cissé ?

La réponse est dans la lettre envoyée à Souleymane Cissé par le Conseil d’administration de la Société des réalisateurs et réalisatrices de films (SRF) qui décerne le Carrosse d’or : « À la croisée du poétique et du politique, de la critique sociale et de la mythologie, de l’ancrage dans la culture pluriséculaire de votre pays, le Mali, et de l’ouverture au monde dans toute sa dimension pluriverselle, votre filmographie a marqué notre cinéphilie en profondeur », explique la lettre. « Votre courage, admirable si l’on songe au climat politique dictatorial dans lequel vous avez réalisé vos trois premiers longs métrages, Den Muso (La Jeune fille, 1975)Baara (Le Travail, 1978) et Finyè (Le Vent, 1982), force notre admiration. Dénonçant l’oppression des pauvres, des femmes et des opposants, confrontant le joug du conservatisme sous toutes ses formes – religieuse, économique et patriarcale –, vous vous êtes cependant toujours gardé de l’idéologie pour créer de l’Art », poursuit le texte. Souleymane Cissé a voué sa vie au septième art, une cinéphilie qui remonte à l’enfance. 

Cinq clés pour aller à la découverte du cinéaste et producteur.

Enfant cinéphile

« Quand j’avais 5 ans, je pleurais pour que mon grand-frère m’emmène au cinéma. Ce qu’il a fait. Cela a été un déclic », confiait le cinéaste à Franceinfo en 2022 à l’occasion de la présentation à Cannes Classics du documentaire Hommage d’une fille à son père réalisé par sa fille Fatou Cissé. Ce métier « fou » a donné chez lui naissance à une filmographie florissante et engagée.

Formé en Union soviétique

« Si je n’avais pas appris ce métier-là à Moscou, je ne serais pas ce que je suis aujourd’hui », confie-t-il dans le documentaire Hommage d’une fille à son père (2022). Après l’indépendance du Mali en 1960, il est l’un des jeunes que le nouvel Etat envoie à l’étranger pour se former afin de servir la future nation. En Union soviétique, il cède à sa passion pour le cinéma. « Je n’avais jamais eu de diplôme quand je suis arrivé en Russie », se souvient-il. « Je n’ai pas eu le bac ni le certificat. Je suis parti parce que nous appartenions à une jeunesse qui voulait sortir du colonialisme et Modibo [premier président malien, NDLR] a eu la présence d’esprit d’envoyer ceux qui voulaient faire quelque chose faire des stages à l’étranger (..) J’ai appris la langue russe et je me suis orienté vers le cinéma qui était ma passion ». Aguerri par cette formation pendant laquelle il a appris « à se débrouiller seul », il se découvre une vocation : réaliser des films dans un pays qui n’en a pas les moyens et dont le personnel politique peut s’averér susceptible.

Une filmographie courageuse et adoubée

Quand on parle de liberté d’expression, Souleymane Cissé sait exactement de quoi il en retourne. Sa première œuvre, Den Muso, dont l’actrice principale n’est autre que sa future compagne et mère de ses enfants, Dounamba Dany Coulibaly, lui vaudra d’être envoyé en prison. Le film, qui sera interdit, évoque le drame d’une jeune femme muette qui sera violée, puis rejetée par les siens à cause de sa grossesse. Den Muso est également le premier film en bambara.

C’est pour des longs métrages tout aussi engagés que le Malien a décroché deux fois l’Etalon d’or du Yennenga, récompense suprême du Fespaco – le plus grand festival de cinéma organisé sur le continant africain – pour Baara en 1979 et, en 1985, Finyé, récit de la révolte des jeunes contre le pouvoir militaire au Mali, une thématique très actuelle depuis les coups d’Etat de 2020 et 2021 qu’a connus le pays. Avec Yeelen (La Lumière), un conte initiatique sur la quête éternelle de connaissance de l’être humain, Cissé décroche le Prix du jury ex-aequo au Festival de Cannes en 1987. « Je n’ai jamais pensé qu’un jour un de mes films serait sélectionné au Festival de Cannes. Quand je suis arrivé, je me suis dit que tout est possible », souligne Souleymane Cissé.

Cissé, un habitué de la Croisette

Son Prix du jury en 1987 a fait de lui l’un des membres de la grande famille cannoise. Depuis des décennies, sa silhouette longiligne habillée du savoir-faire malien en matière de boubous (vêtement traditionnel que l’on retrouve dans plusieurs pays en Afrique de l’Ouest) fait presque partie du paysage cannois tant il est régulier sur la Croisette depuis des décennies. Sa première présence en sélection officielle date de 1982 où il présentait Finyé (Le Vent) à Un Certain Regard. Après Yeelen, il revient en compétition avec Waati en 1995. En 2009, son film Min Yé est programmé en Séances spéciales, section dans laquelle sera projeté Oka en 2015. Souleymane Cissé a été également membre du jury de la 36e édition du Festival de Cannes en 1983. En 2006, il a participé au jury de la sélection Courts métrages et de la Cinéfondation. 

Un leitmotiv : développer le cinéma au Mali et en Afrique

Souleymane Cissé a toujours milité, dans son pays et à l’échelle du continent, pour le développement de l’industrie cinématographique. Il préside l’Union des créateurs et entrepreneurs du cinéma et de l’audiovisuel de l’Afrique de l’Ouest qu’il a fondée en 1997« Dans nos pays, tant que la culture ne sera pas à sa place, on ne bougera pas« . « Les pays les plus développés l’ont compris et c’est pour cela qu’ils n’ont jamais lâché leur industrie culturelle. Les Américains ne lâchent rien, idem pour les Européens »« Il faut que le cinéma bouge d’abord à l’intérieur du continent pour pouvoir ensuite s’exporter », plaide-t-il encore.  

« Le grand-père du cinéma africain » a estimé que les films africains sont censurés par la grande distribution.

Le cinéaste malien, Souleymane Cissé (83 ans), a confié lors d’un l’entretien à l’AFP, son regret que les films africains soient « privés de la chance d’être vus par les spectateurs européens et américains ». Celui-ci pense que le problème se trouve au niveau de la distribution, qui censure les films africains a indiqué l’octogénaire. « On empêche la sortie des films africains dans les grandes salles, ces salles populaires », a-t-il laissé entendre.

Toutefois, le doyen du cinéma africain garde espoir que cette censure finira par se briser. D’autant plus que lui, il a eu « la chance » de voir ses films « distribués correctement », il reste ceux des autres réalisateurs. Cette pratique de censure concourt à « nourrir une forme d’incompréhension sur l’Afrique. Et quand l’incompréhension s’installe, les rapports entre les pays deviennent compliqués. C’est un combo perdant-perdant », a-t-il prévenu.

Avec franceinfo

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